Jeanne Truong: De la métaphysique du flirt
Exhibition: Bee & Bobby Mc Leaf
Artists: Julie Navarro
Location: LIUSA WANG, 77 rue des Archives, 75003 Paris, France
L’œuvre dans sa liberté,
Dans son dépassement de la forme...
Le geste et l’esquisse pour que
Persiste l’instant de l’embrasement...
Un refrain pour une vie...
Me and Bobby Mc Gee, pour Janis Joplin,
De la nostalgie des scintillements de l’enfance,
Un autre nom de l’amour, celui de Bobby Mc Gee aussi
Faut maintenant parler du niveau d’énergie de chaque artiste,
Ce niveau d’énergie qui détermine une œuvre,
A l’instar des éléments dans la nature,
Selon leur numéro atomique
L’énergie de Julie Navarro est feu et vent, éprise de loterie et de mouvement, comme dans la chanson,... un refrain qui vous fait du bien... perles sur branches (Attrape-cœur), lianes céramiques (Zostéra), remontées de bleu (Bleu poudre), toiles moustiquaires (Prairie), rose bonbon (Rose bonbon)... De ponctuations en ponctuations, car après la dissolution, il reste ce qui reste... un dépôt évanescent à la surface des rétines, souvenir fragile de ce qui fut. La tourbe millénaire, dont les années se mesure à la longueur d’un bras plongé dans la glaise humide, s’est cristallisée sous la forme d’empreintes photographiques sur des calques transparents (Tornà). Pour ne pas déranger l’ordre tellurique, Julie Navarro ? On s’arrête là, écoutant la perfection des formes existantes, cherchant à ne pas profaner, seulement à souligner, à recueillir quelques pollens tombés des pétales. Et il y a une profondeur à ce refus d’y toucher vraiment. Les interventions de Julie Navarro nous parlent d’un esprit fleur bleue, obscure et futile... avant l’emprise de la forme, l’emprise de la matière... se retirer avant d’aller trop loin, avant d’abîmer, car toute mutation est aussi d’abord une hideuse destruction... L’art est un tamis qui laisse filer les plus insignifiants, pour ne garder que quelques grains d’expérience, avec l’exigence profonde de la légèreté, tels furent le filet de pêche (Prairie), toile peinte à même les herbes où résident des motifs verts d’un paysage, ou les tableaux de remontée de nuages bleus (Bleu poudre) dans son travail. Un travail pudique, qui a trouvé à sa manière ses bleus et ses flous pour se soustraire à l’empire des regards.
Peut-être pour pouvoir dire : « Ce n’était rien, ce n’était qu’un flirt ? »
Que reste-t-il de tant d’amour, de tant de brûlures et d’absolu ?
Aucune définition définitive de toi, aucune définition définitive de moi
Il reste :
Des baisers sur la bouche, des baisers sur la bouche...
... Tous ceux qui l’auront connue se souviendront du rire énergique de Julie Navarro. Ce rire qui monte des plages et des jeux dans le sable.
... Et tous ces risques que prennent les enfants en jouant, les avons-nous oubliés ?
Question de vie ou de mort, quand l’Indien peau rouge va se faire rattraper par le Capitaine de la cavalerie... Il y a toujours ce jeu inquiétant dans le travail de l’artiste... Rien à perdre que la fin du jeu lui-même, et la course impétueuse pour que demeure le sentiment incandescent du présent. Alors, remettons immédiatement tout ce que nous avons sur la table !
... dirait Janis Joplin, dirait Julie Navarro.
Prairie, 2021
Acrylique sur moustiquaire/Acrylic on mosquito net
120 x 3000 cm
The work in its freedom,
In its transcendence of form…
Gesture and sketch so that
The momentary blaze persists…
A chorus for a lifetime…
Me and Bobby Mc Gee, for Janis Joplin,
From nostalgia of the sparks of childhood,
Another name for love, from Bobby Mc Gee too
We must now talk about the energy levels of each artist,
This energy level that determines a work,
Like elements in nature,
According to their atomic number
Julie Navarro’s energy is fire and wind, impassioned by lottery and movement, like in the song,… a chorus that makes you feel good… pearls on branches (Attrape-cœur), ceramic creepers (Zostéra), blue ascension (Bleu poudre), mosquito netting (Prairie), pink candy (Rose bonbon)… From punctuation to punctuation, because after dissolution, what’s left is left… an evanescent deposit on the surface of the retinas, a fragile memory of what was. Transparent layers of photographic prints crystalize thousand-year-old peat, whose years are measured by the length of an arm dipped in damp clay (Tornà). How will you avoid disturbing the natural order, Julie Navarro ? Stop here, listening to the perfection of existing forms, seeking not to desecrate, only to underscore, to collect some pollen fallen from petals. And there is a profoundness in truly refusing to touch it. Julie Navarro’s interventions speak to us of blue flower spirits, obscure and futile… before the hold of form, the hold of matter… withdrawing before going too far, before damaging, since all mutations are first and foremost hideous destructions…Art is a sieve that filters out the insignificant, keeping only a few grains of experience, with the profound need for lightness, such as the fishing net (Prairie), canvas painted on grass where green motifs of landscape reside, or the paintings of rising blue clouds (Bleu poudre) in her work. A modest work, which in its own way found its blues and blurs in order to divert the world’s gazes.
Perhaps to be able to say: «It was nothing, it was just flirting? »
What is left of all this love, all the passion and absoluteness?
No final meaning for you, no final meaning for me
What’s left :
Kisses on the lips, kisses on the lips...
… Anyone who knows her will remember Julie Navarro’s energetic laughter, one that rises from the beaches and games in the sand.
… And all the risks that children take while playing, have we forgotten them?
A matter of life and death, when the red-skinned Indian is going to be caught by the Captain of the cavalry… There is always this disturbing game in the artist’s work… Nothing to lose but the end of the game itself, and the impetuous race for the incandescent feeling of the present to remain. So let’s put everything we have on the table immediately !
… declares Janis Joplin, declares Julie Navarro.